Dexter, the end.

S’il y a bien une sĂ©rie que j’ai adorĂ©e, suivie, guettĂ©e, c’est bien la saga « Dexter » dont je souhaiterais ce jour faire un brin de causette (mĂŞme si je suis assommĂ© de boulot). Car logiquement, la sĂ©rie vient de s’achever outre-atlantique, et la fin du cycle meurtrier de notre anti-hĂ©ros quadra va donc connaĂ®tre son Ă©pilogue. La saison 7 et les onze Ă©pisodes de la saison 8 ont par ailleurs déçu les attentes des fans de la premières heures, avec un revirement, lent mais certain, concernant les pulsions homicides de l’expert en tâches de sang. Personnellement, j’ai un gros problème avec Dexter, car depuis la première saison, il est Ă©vident qu’on a affaire Ă  tout sauf Ă  un psychopathe Ă  la Hannibal Lecter. Le « hĂ©ros » de Thomas Harris se plaĂ®t Ă  concocter des bons petits plats Ă  partir des restes de ses victimes, Dexter serait plutĂ´t partisan d’un meurtre propre et rapide ; Hannibal peut torturer sa victime et faire durer le plaisir, Dexter serait plutĂ´t du genre Ă  un dĂ©foulement propre et libĂ©rateur ; enfin Hannibal est vĂ©ritablement dĂ©nuĂ© de tout altruisme ou compassion, tandis que Dexter, entre deux coups de couteaux, ne cesse de tĂ©moigner d’une humanitĂ© et d’une Ă©motivitĂ© indĂ©niables (cf : le passage poignant de l’euthanasie dans la saison 3 ; la mort de Rita et sa gestion du deuil au dĂ©but de la saison 5).

Dexter n’est pas, et n’a jamais Ă©tĂ© un psychopathe. Ceux qui crient au scandale après ses Ă©tats d’âme constants en sont pour leurs frais, mais finalement, en niant cette simple vĂ©ritĂ©, ils se sont simplement menti Ă  eux-mĂŞmes. Je me rappelle au dĂ©but de la première saison, quand Dexter, perdu dans ses rĂ©flexions in petto, dĂ©clare son amour rĂ©el (et aucunement pervers (cf ce qu’il fait Ă  un pĂ©dophile photographe au dĂ©but de la saison 3)) pour les enfants. Une affection qui dĂ©montre immĂ©diatement que le personnage est en fait d’une puretĂ© Ă©vidente, son inclination au meurtre Ă©tant en fait une sorte de contrepoids que vient confirmer l’origine du traumatisme. Le premier crime de notre hĂ©ros est d’ailleurs le meurtre d’un pĂ©dophile, le situant immĂ©diatement dans une logique criminelle paradoxalement saine, car se situant sur un axe moral bien prĂ©cis. Un tueur, certes, mais pas un pervers.

Finalement Dexter raconte l’histoire d’un individu cherchant Ă  s’adapter au mieux Ă  la sociĂ©tĂ© dans laquelle il Ă©volue. La sociĂ©tĂ© induisant l’acceptation des autres comme ambition ultime pour celui qui cherche Ă  s’y intĂ©grer, Dexter erre (bon test d’orthophonie 🙂 ) d’Ă©pisode en Ă©pisode, d’une saison Ă  une autre, en quĂŞte de la personne qui pourra le connaitre Ă  la lumière de ses faiblesses, et parvenir malgrĂ© tout Ă  l’aimer. Cette figure tant convoitĂ©e, elle sera incarnĂ©e par l’Ă©pouse, Rita, qui finira disqualifiĂ©e car n’aimant que le reflet dans le miroir ; elle est ensuite par deux fois fraternelles, avec le personnage de son frère de sang puis de Miguel Prado ; c’est au tour du père-miroir Trinity, qui sera lui-mĂŞme disqualifiĂ© car justement trop psychopathe pour faire partie de la sociĂ©tĂ© que Dexter convoite ; puis ce sera l’amante, avec Lumen, complice temporaire et coup d’essai, et finalement celle qui fera disparaĂ®tre ses penchants psychotiques en lui donnant cette fameuse acceptation : Hannah l’empoisonneuse. Le connaissant dans tous ses travers, et l’aimant, la belle transforme la bĂŞte… et l’histoire, comme dans les contes de fĂ©e, logiquement doit s’arrĂŞter lĂ .

PacifiĂ©, neutralisĂ©, dĂ©sarmĂ©, dĂ©samorcĂ©… civilisĂ© ? Dexter a mis 8 saisons pour y arriver, mais a finalement rĂ©ussi Ă  mettre fin Ă  son addiction. Beaucoup d’anciens fans hurlent au pathĂ©tisme et Ă  la trahison. Personnellement, j’ai trop d’affection pour en vouloir Ă  ce gentil mec, qui entre deux missions de vigilante, souvent justifiĂ©es par les actes abominables de ses cibles, passe son temps Ă  parler avec son père dĂ©funt qui incarne justement la conscience dont il croit ĂŞtre dĂ©nuĂ©. Comme il aime Ă  le rappeler comme un exutoire tout au long de la sĂ©rie, Dexter est bien un monstre, mais un monstre d’humanitĂ©, dans toutes ses exagĂ©rations. Solitaire, survivant d’un drame horrible, victime de lui-mĂŞme, coincĂ© dans son rĂ´le de prĂ©dateur qui conditionne sa santĂ© mentale, c’est bien le parcours d’un droguĂ© en puissance qu’il nous est donnĂ© de voir au fil des saisons. Avec un brave type en dessous, un mec vraiment bien qui aime sa sĹ“ur et qui essaie souvent de faire au mieux.

Reste Ă  connaĂ®tre l’Ă©pilogue de cette saison 8… Happy-end ou cynique pied de nez de la destinĂ©e refusant Ă  notre hĂ©ros toute possibilitĂ© de rĂ©demption ? Le plus amusant dans tout ça, c’est que ceux qui dĂ©noncent l’invraisemblance d’une heureuse conclusion optent finalement pour une fin morale en prĂ©voyant la dĂ©chĂ©ance et la punition du tueur. C’est sĂ»rement avoir perdu la vision d’ensemble, car en rĂ©sumant la chose, ce serait Ă©norme de dĂ©crire Dexter en expliquant que c’est l’histoire d’un serial killer, vĂ©ritable Arsène Lupin du crime, qui reste impuni en fondant une jolie petite famille Ă  l’autre bout du monde. Pour le coup, ce serait vĂ©ritablement politiquement incorrect.

See U Dex !

Laisser un commentaire